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Phase 2 du plan de « paix » : les allégations alarmistes mensongères d'Israël sur de prétendues attaques du Hamas en Europe

Par Robert Inlakesh pour  The Last American Vagabond, le 18 décembre 2025

Alors que la deuxième phase du cessez-le-feu à Gaza devrait bientôt entrer en vigueur, Israël s'est employé à utiliser ses otages libérés à des fins de propagande et à échafauder des théories du complot sans fondement sur un prétendu projet d'attaque du Hamas en Europe. Certains des médias qui avaient relayé le 'canular' israélien des "40 bébés décapités" publient à nouveau sans discernement des articles soutenant ces nouvelles allégations.

Les pages officielles d'Israël sur les réseaux sociaux, ainsi que leurs influenceurs rémunérés, tentent de susciter la sympathie des populations occidentales et d'instiller la peur via leur dernière campagne de propagande anti-Hamas.

L'une des allégations les plus marquantes qui ont émergé est que le Hamas, qui n'a jamais 'attaqué' (défendu) qui que ce soit en dehors de la Palestine, comploterait secrètement pour lancer une campagne terroriste dans les pays européens. Cette histoire est devenue virale après la publication d'un article dans The Jewish Chronicle intitulé  "De grandes probabilités que le Hamas attaque l'Europe dans les six prochains mois, selon les services du renseignement".

Selon The Jewish Chronicle, ce prétendu rapport des services du renseignement aurait été rédigé par des personnes "anonymes". La crédibilité de ce rapport s'avère douteuse, notamment parce qu'il émane du  Mirror, le tabloïd qui a précédemment publié aveuglément les allégations d'Israël concernant les supposés " bébés décapités" du 7 octobre, démenties dès 2023. Il est peu probable qu'un rapport du renseignement aussi sensible ait été divulgué à un tabloïd. De plus, le Hamas n'a jamais mené d'attaques en Europe et rien n'indique qu'il pourrait le faire.

Une fois encore, ces allégations ne sortent pas de nulle part. Les théories du complot ont commencé comme toujours dans le cerveau des gourous des think tanks basés à Washington. Le 14 octobre 2023, le Washington Institute for Near East Policy, un think tank influent, a publié un article de Matthew Levitt intitulé " Hamas Plots in Europe: A Shift Toward External Operations ?" [Complots du Hamas en Europe : un revirement stratégique ?], dans lequel l'auteur avance les arguments suivants :

"Les capacités opérationnelles du Hamas à Gaza étant décimées, le groupe cherche d'autres moyens de planifier des attaques. Les responsables européens et israéliens craignent que le groupe ne se soit internationalisé et envisage de mener des attentats à l'étranger, modifiant ainsi son mode opératoire".

Cependant, la propagande n'a pas commencé - ni pris fin - avec un prétendu complot du Hamas contre l'Occident. Le gouvernement israélien est conscient qu'avec le retour de son dernier prisonnier de Gaza, ses justifications pour bombarder des civils ("ramener les otages à la maison" et "libérer les otages") ne tiennent plus. D'où la diffusion par le gouvernement israélien d'une série de "révélations" relatives à ses anciens prisonniers.

Prenons par exemple l'histoire récente devenue virale et diffusée par les comptes officiels du gouvernement israélien sur les réseaux sociaux. L'histoire est présentée comme s'il existait désormais des preuves qu'un "otage israélien" aurait été assassiné par un médecin civil dans la bande de Gaza, soit une révélation choquante si elle venait à se confirmer. Mais examineons d'abord les "preuves" de cette affaire.

Cette histoire a émergé lorsqu'un tabloïd de droite, The Daily Mail, qui a aussi diffusé le canular des "bébés décapités" après le 7 octobre 2023, l'a publiée sans chercher à vérifier les faits ni à présenter de contre-arguments. L'article provocateur était intitulé :  "Un médecin de Gaza a assassiné une otage israélienne en lui injectant de l'air dans les veines... avant que son père ne reçoive de l'otage mourante suppliant qu'on lui laisse la vie sauve".

Pour commencer, l'histoire concerne une soldate israélienne, Noa Marciano, prisonnière de guerre avec un groupe d'autres soldats, à la base militaire de Nahal Oz. Par définition, elle n'était donc pas "otage", mais prisonnière de guerre (PoW) capturée dans une base militaire. L'exécution de prisonniers de guerre est certes un crime de guerre, d'où les interrogations sur les circonstances réelles de sa mort.

L'article du tabloïd s'appuie sur un court extrait vidéo, diffusé par le sergent à la retraite Shai Deluca, qui traduit en anglais le témoignage du père de Marciano, Avi, dans lequel il affirme que sa fille aurait été tuée à l'hôpital al-Shifa. Avi affirme avoir reçu sur Telegram une vidéo montrant sa fille en train de se faire injecter de l'air par un médecin à Gaza.

Sans l'ombre d'une enquête ni aucun esprit critique, cette affirmation a été relayée par les tabloïds, puis les réseaux sociaux du gouvernement israélien, comme une révélation, le Daily Mail écrivant que le père de la soldate "s'est publiquement exprimé pour la première fois devant un petit groupe de personnes".

Or, ces propos avaient déjà été publiés. En mai 2024, les parents de Noa Marciano ont déclaré aux médias qu'"ils avaient choisi de la tuer plutôt que de la soigner. C'est un médecin d'un hôpital qui aurait commis cet acte. Elle a été blessée par les bombardements de l'armée israélienne et a été transportée à l'hôpital Shifa". Cette histoire ne correspond toutefois pas au récit de l'armée israélienne après avoir récupéré le corps en novembre 2023.

L'armée israélienne a reconnu qu'elle a été blessée lors d'une série de ses propres raids aériens. Le Hamas a même diffusé une vidéo de Marciano le 20 novembre de la même année, attribuant sa mort aux frappes aériennes aveugles d'Israël. Après l'invasion de la zone entourant  l'hôpital al-Shifa par Tsahal et  les massacres de civils perpétrés dans et autour du plus grand complexe médical de Gaza, l'armée a retrouvé le corps de la soldate à proximité.

L'armée israélienne a ensuite tenté de réfuter les affirmations du Hamas selon lesquelles Marciano a été tuée par une frappe aérienne,  déclarant que

"les blessures constatées semblent correspondre à des blessures par balle, attesteraient de blessures liées à une chute d'une hauteur importante".

Gardez à l'esprit que rien n'a été dit qui suggère qu'un médecin civil ait été impliqué ou que la soldate ait reçu une injection d'air. Donc, quelqu'un ment.

Il existe trois versions principales concernant la mort de Noa Marciano. Le Hamas affirme qu'il s'agit d'une frappe aérienne israélienne, ce qui a été confirmé par Israël qui a reconnu avoir lancé un missile. L'armée israélienne affirme que la frappe aérienne n'a fait que blesser leur soldat, et que Noa aurait été tuée par une chute ou des blessures par balle. Et les parents de la soldate décédée affirment qu'elle a été assassinée par un médecin.

Ces affirmations simultanées ne peuvent toutes être exactes. Lorsqu'on examine les déclarations du Hamas et de l'armée israélienne, on peut penser que les deux parties auraient des raisons de mentir. Cependant, il est plus logique qu'Israël mente dans ce cas, surtout si le corps a pu être vu par les deux parties.

Il y a ensuite l'affirmation des parents selon laquelle une vidéo Telegram aurait été envoyée, montrant un médecin civil injectant de l'air dans les veines de Marciano. Pourquoi une telle vidéo n'a-t-elle pas été diffusée au public ou même aux organisations de défense des droits humains pour une évaluation indépendante, alors que personne d'autre n'a corroboré cette affirmation  ? Même en supposant qu'ils aient reçu une telle vidéo, comment les parents auraient-ils pu savoir que de l'air était injecté dans ses veines, et comment auraient-ils pu vérifier l'authenticité de la vidéo  ? Hormis cette allégation, rien ne suggère que Marciano soit morte dans ces circonstances.

Les médias occidentaux, tout comme au lendemain du 7 octobre 2023, se refusent à poser les questions élémentaires et à examiner les faits entourant cette histoire. Ils préfèrent publier à l'aveugle une propagande macabre sans la moindre analyse critique.

Depuis, les responsables et propagandistes israéliens ont régulièrement publié des vidéos de leurs prisonniers de guerre détenus par le Hamas, accompagnées de diverses allégations infondées sur leur sort, alors que les preuves révèlent que la plupart d'entre eux ont été  tués par les frappes aériennes israéliennes ou par des tirs amis.

Par ailleurs, les familles de prisonniers israéliens tués par des soldats de l'armée israélienne en décembre 2023 - qui ont ouvert le feu sur eux alors qu'ils étaient torse nu, désarmés, et brandissaient un drapeau blanc improvisé - ont  récemment dénoncé la décision de l'armée de promouvoir le commandant du bataillon ayant supervisé l'incident.

Cette campagne de propagande ne se contente pas de diaboliser le Hamas et de répandre des rumeurs alarmistes sur d'éventuelles attaques terroristes à l'étranger. Elle s'emploie également à déshumaniser les civils de la bande de Gaza, notamment à travers l'allégation récente selon laquelle un soignant de Gaza aurait injecté de l'air dans les veines d'un otage.

Il est peu probable qu'il s'agisse d'une coïncidence, alors que la phase 2 du cessez-le-feu à Gaza approche, dans un contexte de  violations répétées du cessez-le-feu par l'armée israélienne et une indifférence quasi totale pour le massacre en cours du peuple palestinien.

Israël a exprimé des réserves quant à la phase 2, formulant des exigences jugées irrecevables par le Hamas et les autres factions palestiniennes à Gaza. Le programme américano-israélien, adopté par le Conseil de sécurité des Nations unies (CSNU) -résolution 2802 - le mois dernier, valide un  changement de régime dans la bande de Gaza.

L'administration Trump a explicitement exposé sa stratégie de déploiement d'une force d'invasion multinationale, appelée Force internationale de stabilisation (ISF), parallèlement à la mise en place d'un Conseil de paix (BoP) chargé de gouverner Gaza. L'ISF sera chargée de combattre le Hamas et tout autre groupe armé palestinien, tandis que le BoP fera du président américain Donald Trump le dirigeant de facto de Gaza. La mise en œuvre d'un tel projet s'avère complexe, car la plupart des nations refusent de s'impliquer dans une telle entreprise.

Si le projet initial de Washington échoue, les Israéliens sont susceptibles de compromettre l'accord de cessez-le-feu, ou de le maintenir dans une impasse entre les deux premières phases. Pour justifier de telles actions, Tel-Aviv a besoin de nouvelles stratégies de propagande, l'excuse de la "libération des otages" étant désormais exclue.

Un autre facteur à l'origine de cette nouvelle rhétorique victimisante du gouvernement israélien tient à la publication de témoignages de Palestiniens enlevés et détenus sans procès dans des lieux d'incarcération insalubres,  comme l'ont documenté des groupes locaux de défense des droits humains.

En novembre 2025, le Centre palestinien pour les droits humains (PCHR) a documenté de nouvelles preuves d'une campagne systématique de viols et de violences sexuelles menée par Israël contre les détenus palestiniens. L'un des témoignages les plus choquants est celui d'une mère de  42 ans qui a déclaré avoir été violée à quatre reprises par des soldats israéliens, entre autres formes de torture, alors qu'elle était détenue au centre de détention de Sde Teiman.

Une autre organisation de défense des droits humains, Defense for Children International-Palestine (DCIP), a publié un rapport documentant l'enlèvement d'enfants palestiniens à Gaza et les graves tortures dont ils ont été victimes. L'un de ces cas concernait un garçon de 16 ans, Faris, enlevé pendant qu'il tentait de trouver assistance, et soumis à diverses formes de torture, y compris des abus psychologiques à caractère sexuel : on lui a  montré une photo truquée de sa mère allongée à côté d'un soldat israélien, lui faisant croire qu'elle avait été violée et tuée, ainsi que ses deux sœurs.

En 2021, Defense for Children International-Palestine a contacté le ministère américain de la Défense pour signaler le viol d'un garçon de 13 ans dans une prison israélienne. Les États-Unis ont mené une enquête et ont jugé ces allégations crédibles. La réponde d'Israël  ? Il a déclaré le groupe organisation terroriste et a escamoté toutes ses preuves.

 The Last American Vagabond@TLAVagabond In 2021, Defense for Children International-Palestine contacted the US DoD to report the rape of a 13-year-old boy in an Israeli prison. The US investigated, found the claims credible. What did Israel do  ? Declared the group a terrorist org and stole all their evidence. 8:55 PM ∙ Dec 18, 2025 -- 26 likes • 16 Restacks pic.twitter.com/d5n7KOwPsh - The Last American Vagabond (@TLAVagabond)  18 décembre 2025

Alors que les médias occidentaux ont publié en première page des articles sur des allégations douteuses ou des scénarios catastrophes imaginaires impliquant des Israéliens détenus à Gaza, ils ont pratiquement ignoré les nombreuses preuves attestant qu'Israël mène un programme de torture à grande échelle contre des milliers de Palestiniens de Gaza. Arrêtées sans inculpation et indépendamment de leur âge, un nombre considérable de ces femmes et enfants sont aujourd'hui encore détenus dans des centres de torture.

Malheureusement, les grands médias semblent se contenter du rôle de porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères. En publiant la propagande israélienne sans vérification préalable et manifestement réticents à rendre compte de l'une des campagnes de viols et de tortures les plus effroyables au monde, ces médias se comportent comme des organismes de relations publiques chargés de maquiller le génocide. Leurs reportages suggèrent que, à l'instar du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, ils perçoivent les Palestiniens comme des hordes d'Amalécites à abattre, et non comme des êtres humains à part entière dignes de respect et de la protection de la communauté internationale.

Traduit par  Spirit of Free Speech

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